Au lendemain de la fête des pères et anniversaire du roi de Thaïlande, les vents d'hiver auraient-ils gagné la partie ?

Y aura-t-il encore des retours de mousson comme il y a quelques jours ?

Vent de sud violent emmenant un ciel noir chargé d’électricité puis déversant ses trombes d'eaux sur les rizières alors que les brins de riz, secs comme une trique, jaunes comme l'or annonçant une magnifique récolte, couchés par les vents qui avaient tournés pensait-on irrémédiablement au nord-nord est, tout ce ciel qui a bien faillit mettre la bonne humeur des gens d'ISAN au ras des rizières.

[...]

Il fallait faire vite, couper le riz avant qu'il ne pourrisse dans les champs qui s 'étaient de nouveau remplis d'eau stagnante, l'égrainer puis enfin le faire sécher sur tous les bouts de goudrons et de ciments que les routes du Baan pouvaient compter ! Une course contre la montre, les « Rot Khao » -moissonneuse à riz- prisent d’assaut et tout ce que le village comptait de petites mains s'unirent et le riz fut sauvé...

Tous l'emmenèrent en même temps vers les petites coopératives, voire les collecteurs d'état mais chez les derniers les files d'attentes étaient d'autant plus grandes ! Tous ces intermédiaires manquaient de camions pour évacuer les plate-formes où le riz s’amoncelait donnant du relief au paysage définitivement plat des alentours de Pangkhan !

Il fallait de la patiente pour livrer son riz, des heures et des heures d'attente où sur les bords des départementales, au pied des camions, pickups, tracteurs et « buffles mécaniques » chargés à bloc, on s'installait sur des nattes avec son panier de riz, sa réserve de « pla laa » et l'inévitable fiole de « lao khao », pour partager et parler afin de tuer le temps !

Une semaine où les routes secondaires de la cambrousse habituellement si paisibles ressembleraient aux autoroutes reliant Krung Thep au reste du pays ! Tout s'est fait en un temps record, l'eau tombée de ce ciel de mousson imprévu devint une aubaine...

On a mis le feu aux tiges des plants de riz restant au ras de l'eau stagnante de la rizière, puis certains ont déjà labouré pour réensemencer cette terre pour une future récolte...On ne peut plus dire que le paysan d'ISAN se laisse vivre, plus le temps à la terre de respirer, rendement est le maître mot, il faut du rendement coûte que coûte !

Et puis ce matin, comme je l'écrivis en amont, les vents ont tournés, le ciel s'est paré de sa couleur bleu glace, limpide comme l'eau d'une rivière de montagne, plus un nuage de quelques formes qu'il soit, tout ceci pour nous faire dire qu'il faisait frisquet.

À six heures le thermomètre est descendu sous les vingt degrés, le baromètre est montée d'un coup vers les mille quinze millibars, la saison froide est arrivée !

Trois mois de frais voire de froid cinglant lorsque les vents venus de la Chine voisine s'engouffreront dans la vallée du Maekhong et feront que mes voisins du Baan revêtiront bonnets et blousons matelassés de toutes sortes !

L'ISSANAIS est frileux, même si dès le mois de mars lorsque la saison chaude débutera, il me dira, il se dira alors « qu'est-ce-qu'il peut faire chaud ! ». L'homme est partout le même dans le monde, il fait trop chaud, il fait trop froid, il pleut trop, mais que pouvons-nous y faire ? Dame nature est la maîtresse de ce monde où nous vivons et où nous n'en sommes qu'une infime partie, il faut s'incliner et accepter ce qu'elle décide !

Profitons donc de cette fraîcheur, la nature va se reposer aussi, les arbres et les herbes vont arrêter momentanément de pousser, du répit pour tous, pour les plantes et pour ceux qui doivent les dompter. Il ne pleuvra plus pendant presque six mois, puis on crèvera de chaud avant que le ciel se déchaîne et lâche ses cargaisons hors normes de pluie, les vents reviendront alors à l'est puis au sud, ce sera la mousson qui fera renaître toute cette nature endormie depuis trop de temps et fera sortir toutes et tous dans les rues, torse-nu, nu pied, bras ouverts à embrasser la pluie puis la complainte reprendra du trop d'eau mais nous aurons déjà fait le tour du cadran, une année se sera écoulée et tout recommencera tel un éternel rouage, telle la vie, telles Les vies qui nous attendent, si bien illustré par Natarâja, le Shiva danseur qui par cette danse céleste réinvente l'ordre cosmique pour le détruire de nouveau et ainsi de suite pour que nos vies, pour que toutes les vies ne soient qu'harmonies et bonheurs !

Paille Kheundheu...